Moins d’un travailleur sur dix en France est aujourd’hui non-salarié. Cette situation est le résultat de mutations économiques profondes ayant affecté le non-salariat, qui a vu ses effectifs divisés par deux depuis le début des années 1970. Cette évolution doit beaucoup au recul de l’emploi agricole durant cette période de forts gains de productivité dans l’agriculture, mais les déterminants de l’évolution des effectifs non-salariés dans les secteurs non-agricoles sont eux mal connus. Nous présentons ici le modèle SENS (Simuler l’Emploi Non-Salarié). Ce modèle a pour objet de mieux comprendre les évolutions de la composante non-agricole du non-salariat à l’aune de deux mécanismes explicatifs identifiés dans la littérature : le non-salariat « entrepreneurial », d’une part, se développe quand l’espérance de gains des non-salariés augmente ; le non-salariat « par défaut », d’autre part, traduit un comportement d’activité qui se développe lorsque les perspectives sur le marché du travail salarié se dégradent. Le modèle SENS indique qu’à long terme, deux facteurs structurels influent sur la proportion de nonsalariés dans les secteurs non-agricoles : la recomposition du secteur des commerces avec l’apparition des grandes surfaces a alimenté le repli de l’emploi non-salarié, tandis que le vieillissement de la population active dynamise progressivement l’emploi non-salarié. Trois facteurs conjoncturels permettent d’expliquer des fluctuations de plus court terme : le dynamisme des créations d’entreprise, l’évolution du chômage (logique de non-salariat « par défaut ») et les perspectives de création de richesse que laissent entrevoir la conjoncture (logique de non-salariat « entrepreneurial »). Quelques modélisations alternatives permettent d’évaluer la robustesse du modèle, confirmant ses qualités explicative et prédictive.